Le mÖ du président

Le président du maelström

DISCOURS DU PREZ’

lu le 7 mai 2022 à l' INAUGURATION 
du 26ième FESTIVAL GRAND MAELSTRÖM A DUPIRE
sur le thème "On n'est pas à une absurdité près"

 
MaelstrÖmiennes, maelstrÖmiens, Mesdames, Messieurs.


Voilà deux ans que nous nous sommes perdu·e·s de vue. 
Vous nous avez manqué ! 

C’est donc un réel plaisir de vous retrouver cette semaine pour notre 26e festival. Il sera question de migrations, de femmes libres ou sauvages, de poésie ou de comédie musicale. Un programme éclectique aux couleurs de notre époque.

Une époque justement qui, en deux ans, nous a gratifié·e·s de son propre festival d’absurdités. 

L’absurdité d’avoir imaginé qu’un système de santé se pilotait comme un entrepôt d’Amazon : on n’est pas à un mort près. 

L’absurdité d’un « quoi qu’il en coûte » après avoir amputé les APL de 5 euros par mois : on n’est pas à un pauvre près. 

L’absurdité d’une guerre inutile et ignoble entre deux peuples soi-disant frères : on n’est pas à une boucherie près. 

L’absurdité de réfugié·e·s de 1re et 2e classe, certain·e·s plus légitimes que d’autres ; un malheur plus légitime qu’un autre : on n’est pas à une discrimination près. 

L’absurdité d’une campagne électorale qui met à l’honneur l’insignifiance et se tait sur ce qui adviendra bientôt de notre petit monde fragile et épuisé : on n’est pas à un effondrement près.

Déjà, Sainte-Beuve, à son époque (1868), nous prévenait : « Les absurdités d’un temps deviennent l’objet sérieux des études d’un autre temps ; et comme on ne veut pas avoir l’air de s’appliquer gravement à des absurdités, on suppose à celles-ci des raisons secrètes et des lois profondes qui n’y furent jamais. On leur prête un grand sens qu’elles n’ont pas eu ». Les mensonges, la propagande et les théories du complot ont de beaux jours devant eux. Soyons prêts !

Comment vivre en absurdie, 
sans se perdre et se morfondre, abattu par les passions tristes de notre époque ? 

Flaubert dans sa correspondance nous indique un chemin possible : « je suis un pauvre homme bien simple et bien facile, et “bien homme”, tout ondoyant et divers, cousu de pièces et de morceaux, plein de contradiction et d’absurdité. Si tu ne comprends rien à moi, je n’y comprends pas beaucoup plus moi-même. Tout cela est trop long à expliquer et trop ennuyeux, mais revenons à nous ! ».


Oui, revenons à nous, à ce qui fait l’essence de notre humanité, de notre mystère.

Oui, revenons à nous, invoquons la joie sans être naïf, invoquons l’indignation sans être violent, invoquons nos contradictions sans nous disloquer.

Et comme on n’est pas à une absurdité près, j’oserais vous lancer « restons vivants ! », 
car en vérité je vous le dis, on n’est pas à une utopie près ! 

Bon festival !


 

Laurent Ostiz, président du maelstrÖm théâtre.